jeudi 22 janvier 2015

Une réforme éducative qui n’en finit pas….D’ici et d’Aujourd’hui.-

Le Nouvelliste | Publié le : 21 janvier 2015

De 1982, début de la réforme Bernard, à nos jours, 33 ministres de l'éducation se sont succédé. Un chiffre magique! Visionnaire, le ministre Joseph C. Bernard a payé cher de sa peau la réforme qui porte aujourd'hui son nom, notamment en voulant introduire le créole comme langue d'apprentissage. En effet, ce ministère, engoncé dans ses rouages, mangeur d'hommes, broyeur de compétences, a vu passer bien de têtes connues (Thomas Madiou, Dumarsais Estimé, Daniel Fignolé, Jean Price Mars, Émile Saint­Lot). D'énormes problèmes d'ordre culturel – pas seulement politique, organisationnel, programmatique – sont à la base de cet échec collectif.

Pourtant, très peu de progrès ont été réalisés depuis l'indépendance dans ce domaine. Le diagnostic du système est accablant, désespérant même ! L'État n'a construit qu'environ 25% des écoles de la République. La majorité des bâtiments est vétuste ou pas appropriée pour recevoir des enfants, encore moins pour servir d'école. Selon les statistiques du ministère de l'Éducation nationale, plus de 80% des maîtres ne sont pas réellement aptes à dispenser des cours, sans qualifications ni commodités pédagogiques. Des salles de classe pléthoriques, une indiscipline grandissante, des élèves en situation d'échec scolaire, préférant se livrer aux heures de cours à des activités de délinquance.

Pour compléter ce triste tableau, il faut mentionner le recrutement tous azimuts d'enseignants par des notables, des élus et autres. Ce qui crée une situation de tension sur le trésor public dans la mesure où les provisions financières n'ont pas été faites pour les payer. Dans un pays où l'État n'a jamais mis les moyens réels pour améliorer les conditions de vie des enseignants, la traversée du désert est dure pour le secteur. Un véritable calvaire!

Depuis Bernard, certains ministres, avertis ou proactifs, ont essayé de s'attaquer à ce monstre de "mal­formation massive" payant aussi cher le prix. D'autres ont vite abandonné le combat, surtout face à une pléthore de syndicats d'enseignants bruyants, sortant de nulle part, sans projet éducatif. Il convient d'admettre que certains, comme la CNEH, tranchent dans le décor de par leur nombre d'années d'existence (plus de 25 ans) et leur réseau au niveau national.

Malgré les obstacles en tous genres, le ministre actuel, Nesmy Manigat, professeur d'université, est le dernier en date, qui, depuis Bernard, ose s'attaquer véritablement au monstre. Sans réchigner. 12 mesures ont été prises, avec l'appui du président de la République, pour tenter de redresser la barre. Graduations inopportunes, chèques zombis, conflits d'intérêts public­privé, fausses écoles, manuels inadaptés, curriculum désuet, évaluation des examens officiels, échec scolaire, tout y passe. Ce qui pousse certains critiques à juger qu'il provoque et va trop vite.

Il n'est guère étonnant dans ce contexte de voir des syndicats d'enseignants, gardiens du statu quo, monter au créneau, pour sauvegarder leurs privilèges, pour «bloquer» au lieu d'encourager, d'éclairer. La question de la réforme des programmes d'études est plus que nécessaire. Il est important d'avancer inexorablement à ce niveau. L'avenir de notre enseignement en dépend. Sur ce dossier incontournable, ils devraient apporter une contribution constructive, non?

Pressurée aujourd'hui par toutes sortes de crises, la société haïtienne va­t­elle purement assister à un énième match de boxe entre un ministre de l'éducation réformateur qui risque sa peau et les syndicats, adeptes du «rache manyòk»? alors que c'est l'avenir de millions d'enfants qui est en jeu?

Pierre-Raymond Dumas

 ____________________
RESEAU CITADELLE : LE COURAGE DE COMBATTRE LES DEMAGOGUES DE DROITE ET DE GAUCHE , LE COURAGE DE DIRE LAVERITE!!!
"You can fool some people sometimes, 
But you can't fool all the people all the time."
 (
Vous pouvez tromper quelques personnes, parfois, 
Mais vous ne pouvez pas tromper tout le monde tout le temps.
) dixit Abraham Lincoln.

Aucun commentaire: