mardi 18 septembre 2012

Le riz comme pour le pétrole

Le riz comme pour le pétrole
Le Nouvelliste
Robenson Geffrard, rgeffrard@lenouvelliste.com

Le gouvernement veut utiliser le modèle d'importation des produits pétroliers pour faire baisser les prix de certains produits alimentaires. Avec cette mesure, l'Etat haïtien sera le seul importateur de riz sur le marché local. La Commission de stabilisation des prix, récemment formée, multiplie les rencontres en ce sens avec les personnes concernées.
Le ministre du Commerce et de l'Industrie, Wilson Laleau
Le ministre du Commerce et de l'Industrie, Wilson Laleau
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Cinq produits alimentaires jugés sensibles sont concernés par cette nouvelle mesure gouvernementale. Il s'agit du riz, du maïs, de la farine, de l'huile et des haricots. La ministre de l'Economie et des Finances a fait savoir lundi matin, sur les ondes de Radio Magik 9, comme pour le pétrole, que le gouvernement veut accorder une attention spéciale à des produits alimentaires sensibles afin de garantir la stabilité de leur prix sur le marché local à travers tout le territoire national.  Selon les explications de Marie-Carmelle Jean-Marie, pour les produits pétroliers, l'Etat a un accord spécial avec le Venezuela, les entreprises en Haïti placent leurs commandes, payent et reçoivent les produits qu'elles distribuent ensuite.

En revanche, a-t-elle souligné, l'Etat met en place une structure des prix négociés avec ces entreprises qui tient compte de tous les frais, des taxes et d'une marge de bénéfice confortable avant de fixer un prix appliqué sur tout le territoire. « Nous pensons que ce modèle peut être appliqué sur tous les produits sensibles pour les consommateurs. Mais nous n'allons pas nous substituer aux importateurs », a soutenu la ministre, indiquant que l'Etat haïtien n'a ni les moyens logistiques ni les moyens financiers pour ce genre de transaction.

Parallèlement, selon ce qu'a confié au Nouvelliste une source au sein de la Commission de stabilisation des prix, comme pour les produits pétroliers, l'Etat haïtien sera le principal importateur de ces produits, particulièrement le riz. « Par cette décision, le prix du riz sera le même n'importe où sur le territoire de la même façon que les produits pétroliers. Les importateurs de jadis seront les distributeurs… », a expliqué notre source.

 «Le Bureau de la monétisation se chargera de la commercialisation du produit, et la Banque centrale de l'aspect financier», a souligné notre source. « Pour être distributeur, l'entreprise doit avoir la capacité de stocker 25%  de sa commande en attendant l'arrivée de la prochaine commande. De ce fait, il y aura toujours du riz sur le marché local pour éviter la rareté et la montée du prix comme c'est le cas actuellement. »

Le Grand argentier de l'Etat a reconnu que le prix du riz n'a pas augmenté sur le marché international, alors que ça augmente effectivement sur le marché local. Comme première tentative d'explication, Marie-Carmelle Jean-Marie a évoqué la dépréciation de la gourde par rapport au dollar. Les importateurs anticipent sur le prix dans la perspective d'une plus grande dévaluation de la gourde face à la devise américaine avec laquelle ils achètent sur le marché international.

En outre, la période de sécheresse et le passage de la tempête tropicale Isaac sur le pays ne sont pas sans conséquence sur la montée des prix des denrées de première nécessité. Encore une fois, cette situation pousse les importateurs à anticiper en augmentant leur prix.

Par ailleurs, la titulaire du MEF a indiqué que le gouvernement ne va pas acheter sur le marché international 300 000 sacs de riz comme le font croire les rumeurs. Cependant, a-t-elle précisé « dans le cadre des accords de coopération et d'aide alimentaire avec des pays, le Japon va envoyer en Haïti 288 000 sacs de 30 kilos. Comme d'habitude, ce don sera commercialisé par le Bureau de monétisation et l'argent servira à des programmes de développement».

 D'autres mesures ponctuelles et à moyen terme pour aider la population

D'abord, le gouvernement va rendre plus disponibles les produits alimentaires à travers des cuisines mobiles et le programme « Ti manman cheri » pour les petites bourses et les plus vulnérables, a annoncé le ministre du Commerce et de l'Industrie. Ensuite, les autorités vont mettre sur le marché 300 000 sacs de riz qui seront vendus à des distributeurs locaux. « Ce riz diminuera la pression sur le marché local en augmentant l'offre. L'Etat s'assurera que le prix ne dépasse pas un certain montant », a expliqué sur Radio Magik 9 Wilson Laleau.

Selon le ministre du Commerce, il n'y a pas réellement un manque de riz sur le marché local. Certains distributeurs et importateurs  ont stocké ce produit, ce qui occasionne une rareté et fait grimper les prix. Dans certains cas, des importateurs font des bénéfices qui dépassent la mesure. L'Etat veut aussi intervenir à ce niveau pour apporter des correctifs.

Une fois passée l'étape de la stabilité des prix du riz sur le marché, Wilson Laleau a fait savoir que le gouvernement va intervenir dans la production agricole pour réduire la dépendance alimentaire du pays. Selon lui, les autorités vont accompagner les planteurs lors de la prochaine saison agricole. « Environ 120 millions de gourdes ont été mises à la disposition du ministère de l'Agriculture pour l'achat de semences, pour faire le curage des canaux d'irrigation, le drainage, entre autres. Ensuite s'exécutera un grand programme d'infrastructures agricoles qui consistera à revitaliser un ensemble d'espaces propices à l'agriculture pour un milliard de dollars… »

Toujours à moyen terme, le gouvernement va mettre de l'ordre dans la question de tarifs douaniers. Une commission interministérielle a été mise sur pied en ce sens par le président de la République.

 Il faut souligner que les 300 000 sacs de riz que va envoyer le Japon en Haïti la semaine prochaine représentent entre huit et neuf tonnes alors que nous importons environ 40 000 tonnes  de riz chaque mois.

Robenson Geffrard, rgeffrard@lenouvelliste.com

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