mercredi 10 novembre 2010

Haïti-Élection : la violence annoncée ---les acteurs. (De sources confidentielles)

Haïti-Élection : la violence annoncée ---les acteurs. (De sources confidentielles)

 

Par Cyrus Sibert, Cap-Haïtien, Haïti.
Radio Souvenir FM, 106.1 :
souvenirfm@yahoo.fr

Le Ré.Cit. (Réseau Citadelle) : www.reseaucitadelle.blogspot.com

 

(Je publie le présent texte pour l'histoire et la vérité. Avec le choléra, on ne sait jamais. Je vois tellement de morts autour de moi, que je décide de tout publier sur les prochaines élections. D'autres confrères peuvent ne pas avoir la chance de participer aux rencontres qui m'ont permis de collecter ces informations et opinions grâce à la collaboration de personnalités bien placées. Vive Haïti!)


Il n'est un secret pour personne, le 28 novembre 2010 sera un jour de deuil en Haïti. Entre rupture et continuité, le duel sera cruel. Les pertes en vies humaines seront considérables. Les deux camps se préparent à un affrontement armé autour des urnes. Ce qu'on appelle  « élection » divisera le pays à jamais. Celui qui remportera la victoire aura du mal à mettre ses victimes autour d'une table. Pour le moment, tout le monde se prépare. Du Nord au Sud, de l'Est à l'ouest, il y a une augmentation dans la circulation des armes à feu. Sur le marché informel, les prix montent. Des acheteurs liés à des candidats inquiets sont prêts à payer fort pour une arme de guerre ou un pistolet. Le chef de l'Etat René Préval a déjà lâché ses sbires. Dans une réunion au Palais national avec des militants de base, il leur a confié avoir tout fait pour rendre la continuité possible, à eux d'agir. Toutefois, la bataille ne sera pas facile. Le parti INITE n'est pas le seul à avoir à sa disposition des hommes de métier. Tout le monde se mobilise. Le silence de la Police Nationale d'Haïti contrôlée par « Dimitri Vorbes » et le mutisme de la MINUSTAH paralysée par des calculs diplomatiques autorisent toutes les parties à agir sur le terrain.


Selon des sources confidentielles, le 16 novembre prochain, il y aura des changements au sein de l'appareil répressif d'Etat, la composante Police/Justice. Une liste de juges de paix, commissaires du gouvernement et de police est dressée en ce sens. A une réunion sur les élections tenue au Palais National, l'un des militants présents expliqua au Chef de l'Etat que Paul Denis travaille contre la « continuité ». Pourquoi ? Parce qu'il n'a pas encore procédé aux changements planifiés dans l'appareil de Justice et de la Police. Une critique adressée en présence du Ministre de la Justice qui a répliqué en demandant à l'assemblée d'attendre le 16 novembre 2010. Dans le Sud, les armes sont prêtes. Des bus du service DIYITE ont été fournis pour le transport des groupes armés le jour du scrutin. Il y a des armes de différents calibres disponibles dans différentes localités. Les criminels de renom feront leur entrée en scène le 27 novembre 2010. Pour ne pas repousser les électeurs qui rejettent les bandits auteurs d'assassinats, de viols et de crimes odieux, INITE décide de les garder à l'écart durant la campagne. A partir du 27 novembre 2010, ces hommes de métiers commenceront par terroriser la population ; l'espace public sera occupé par des évadés de prisons, des assassins réputés qui agiront pour forcer les électeurs à rester chez eux le jour du vote.   


Toujours d'après nos sources, les hommes forts de la Plate-forme INITE sont Paul Denis, Rodolphe (Roro) Joazil et Dimitri Vorbes. Ils seraient les nouveaux hommes forts de la continuité. Ces derniers chercheraient à écarter Joseph Lambert et son clan. Ces trois (3) hommes se seraient plaints du comportement auto-suffisant de Jude Célestin, le candidat de leur Plate-forme. Selon eux, "Préval c'est du passé" ; Jude doit les rencontrer et négocier sa Présidence directement.  Toute la tourmente de Jacques Édouard Alexis viendrait du refus de rassurer en des termes clairs les Seigneurs de l'INITE. L'Ancien Premier Ministre de LESPWA les aurait envoyé au diable avec sa fameuse phrase « Nous n'en sommes pas encore là ! Je ne suis pas contraint de promettre quoi que ce soit ! »


Dans cette réalité de violence annoncée, les autres partis ne sont pas des enfants de chœur. Ayiti An Aksyon dans l'Artibonite, COREGA dans le Sud, FRN de Guy Philippe dans la Grande Anse, sans compter les autres groupes et sous groupes, tous se connaissent en la matière. D'ailleurs, le mouvement "Sauvegarde" du Leader du FRN est une structure qui attire des jeunes militants combattants qui ont fait 2004 et d'autres à la recherche d'activités solides et de sensations fortes pour le progrès. Les militaires et policiers démobilisés offrent leur service à tous les camps.


Les observations sont les suivantes :


RDNP ----Les gens ont beaucoup d'estime pour Madame Myrlande Manigat. Cependant, sur le terrain, on ne sent pas encore l'organisation qui va l'aider à défendre son vote. Son alliance avec COREH a été perçue différemment par le public, car, même quand elle l'aide à régler certains problèmes dans la dynamique des forces sur le terrain, elle peut ternir son image. Des hommes de COREH sont souvent qualifiés de truands dans certains milieux diplomatiques pour leur indiscipline, leur absence de cohésion et leur incapacité à garder confidentiel le contenu d'une rencontre....  Il y a aussi la difficulté à contrôler la plate-forme qui supporte Mme Manigat : Steven Benoit sera avec Céant ou avec Jacques Édouard Alexis, des membres de la structure de Ayiti An Aksyon dans le Sud supportent Chavannes Jeune, d'autres marchent avec INITE : un vrai désordre qui empêche de mesurer de façon rationnelle l'apport que le RDNP peut escompter de son alliance tactique. Toutefois, si le Sénateur Youri Latortue a une force limitée dans d'autres régions du pays, son poids dans le Haut Artibonite est considérable. Il y a aussi le Sénateur du Nord-Ouest Evallière Beauplan qui peut apporter gros à l'ex-première dame candidate. Le soutien ouvert du Sénateur Rodolphe Boulos durant le passage de Manigat dans le Nord est un plus. Rudy reste très populaire dans le Nord-Est, malgré son éjection du Sénat, suivant les ordres de René Préval.


Jacques Édouard Alexis --- n'a pas d'argent. C'est ce qu'on peut déduire de la déception de ses partisans qui ne trouvent pas les ressources pour contrecarrer INITE sur le terrain. La décision du Président René Préval de choisir Jude Célestin comme Candidat de la Plate-forme INITE a été un coup dur pour l'ex-premier Ministre. Tout son travail de structuration et de planification à partir des (5) cinq ministères qu'il contrôlait, et spécialement l'Intérieur, a été détruit avec la confusion et le conflit ouvert créé par l'arrivée du beau-fils naturel de Préval dans la course. Une décision que le chef de l'Etat regrette déjà. Il l'a dit à des proches : « Sous l'influence des hommes qui haïssent Alexis, j'ai commis la plus grosse bêtise politique de ma vie. Il devait être l'objet de mon choix ». Faut-il signaler qu'un nombre important de leaders de base du parti INITE pourrait changer de camps à la dernière minute en faveur de Jacques Édouard Alexis qui parait, à leurs yeux, un camarade politique victime de l'arrogance de certains bourgeois qui contrôlent la Plate-forme INITE.Faute de ressources, d'autres jeunes, non rassurés du succès d'Alexis, rejoignent le Notaire Jean Henry Céant.


Charles Henri Baker--- RESPE serait l'unique parti de l'opposition à maitriser les outils électoraux : les listes électorales, la formation de plusieurs centaines de mandataires, de membres de bureau, la formation d'un cabinet spécialisé pour le contentieux, en un mot tous les détails du vote. Reste à savoir si les militants du Parti RESPE ne se laisseront pas acheter par les hommes du parti au pouvoir qui disposent déjà de plusieurs millions – soit 132 millions de dollars U.S. – pour payer les procès-verbaux après la fermeture des bureaux de vote. Comme atout, contrairement à 2006, Charlito a le support de son beau-frère Andy Apaid. Un homme d'Affaire connu pour son talent d'activiste, d'organisateur social  et ses relations dans les milieux politiques des pays influents en Haïti. Pour un bourgeois « de couleur », Monsieur Apaid a un langage capable de convaincre l'homme de la rue.


Michel Martelly--- selon les observations, le chanteur parait être de plus en plus un candidat important. Sweet Miky, de son nom d'artiste, jouit d'une grande sympathie dans les grandes villes où des jeunes qui ne font plus confiance aux politiques y voient une alternative intéressante. Dans les sondages truqués ou objectifs, il garde un pourcentage stable qui pourrait faire du mal jusqu'à créer une surprise au cas où certains indécis opteraient pour une participation au vote. Monsieur Martelly semble être très bien encré dans les quartiers populaires ; son électorat est composé de personnes décidées à aller voter le 28 novembre prochain.


Jean Henry Céant--- de « AIMER HAÏTI » prend du poids sur le terrain. On ne sait pas encore au détriment de qui, mais partout dans le pays, sa plate-forme se renforce. On sent que ses hommes font un travail intéressant sur le terrain. Reste à savoir s'il aura le temps de consolider sa structure électorale hétéroclite avant le 28 novembre 2010. Toutefois, CEANT arrive à faire travailler des Lavalassiens durs et des non-lavalassiens en structures séparées, ce qui donne deux (2) structures pour le Notaire Candidat à la Présidence.

Toutes ces informations sont connues des services de renseignement des pays dits amis d'Haïti et de la MINUSTAH. Il y a de cela deux (2) semaines des hommes des forces spéciales de l'Armée Américaine avaient mené une opération clandestine de renseignement en ce sens sur le territoire. Le Pentagone et d'autres organes de renseignement américains sont au courant de la situation. Même quand actuellement leur ambassade à Port-au-Prince ne fait pas grand-chose en termes de renseignement ni de collecte de données, Washington est au courant de tout.  Selon les témoignages et commentaires d'acteurs politiques et de sécurité publique, c'est la première fois qu'en période électorale, l'Ambassade des États-Unis se montre si désintéressée, évitant de multiplier des contacts pour avoir une idée de la situation sur le terrain.  Dans le livre La Cia Et Le Culte Du Renseignement de Marchetti Victor Et Marks John D. , un ancien analyste américain du renseignement, décrit ce comportement comme la certitude d'une opération clandestine en cours. Généralement cette sérénité explique que l'un des acteurs clé de la conjoncture est un Agent activé de la CIA. Dans ce cas, le dossier est traité directement dans le cadre d'une diplomatie secrète menée par Langley. L'affaiblissement de l'ambassade viserait à limiter les possibilités de voir toute l'histoire exposée par devant une commission du Congrès ou du Sénat américain. Comme exemple, il y a le cas de Manuel Antonio Noriega qui traitait directement avec ses employeurs. Les Ambassades Américaines de l'Amérique Centrale savaient peu des opérations clandestines de l'homme fort du Panama. Il recevait même des visites de Bill Casey, Directeur de l'Agence, qui arrangeait tout pour s'assurer que les petits diplomates ne viennent fourrer leur nez dans des affaires qui ne les regardent pas. Dans le cas haïtien qui nous concerne, on peut se demander si l'un des trois (3) hommes forts de l'INITE ne bénéficie pas d'un appui important au point de préparer la violence électorale au su et au vu de tout le monde, un appui qui permet de paralyser la MINUSTAH.

Comme en Afghanistan lors des dernières élections présidentielles, l'ONU va faire les frais d'une opération de renforcement de contrôle sur le pouvoir politique en Haïti. Edmond Mullet est sur le point de servir de fusible pour protéger Bill Clinton, car l'ancien président américain ne peut en aucun cas laisser sa réputation dans ce jeu macabre, sa femme Hillary est très ferme sur ce point. La violence que des haïtiens se préparent à lancer pour le contrôle du pouvoir semble aller dans le sens du jeu du grand voisin. Reste à savoir si ceux qui lanceront cette violence pourront l'arrêter.


Car, en Haïti nous commettons souvent l'erreur de lancer la violence et souvent elle nous emporte en exil. C'est ridicule de voir des régimes se déstabiliser dans le but, croient-ils, de se renforcer. Aristide commettait souvent l'erreur de commander à ses hordes de bloquer la Capitale. Souvent dans ce jeu de blocage, des éléments externes s'immiscent pour le contraindre à négocier et même à prendre une grande vacance en Afrique.  


Le comportement de la MINUSTAH en dira plus sur son niveau de complicité dans cette violence électorale annoncée, car rien n'empêcheraient aux forces de l'ONU, de bloquer les grandes artères du pays, le jour du scrutin et d'empêcher aux bandits de circuler. La mobilité reste l'élément clé de toute l'organisation de la violence électorale. On verra si les États-Unis, tellement motivés  à envoyer des troupes à chaque catastrophe naturelle et/ou humanitaire, n'enverraient pas des soldats supplémentaires pour aider la MINUSTAH à bloquer les grandes artères et permettre à la PNH de mieux sécuriser les centres de vote pour un scrutin libre, honnête et démocratique. L'accord de l'ONU signé avec  l'Administration Bush permet facilement aux États-Unis d'envoyer des troupes en Haïti pour renforcer la MINUSTAH au besoin. Le comportement cynique des membres de la Communauté internationale et spécifiquement des États-Unis dira long sur la nature des forces en présence. Déjà on comprend mal le silence de l'Envoyé Spécial Edmond qui après avoir unilatéralement fixé la date du 28 novembre 2010 pour l'organisation des élections en Haïti ne dit rien sur la violence annoncée.


En tout cas, le régime de René Préval n'aura pas la chance d'être seul sur le terrain le jour du scrutin. Définitivement, le Chef de l'Etat a beau annoncé une faible participation, portant plusieurs secteurs seront au rendez-vous. INITE sera obligé de choisir entre 1- laisser au peuple le temps de s'exprimer, 2- organiser un massacre, 3- annuler les élections. INITE n'a pas le monopole de la violence. D'autres acteurs entendent l'acculer jusqu'à montrer son vrai visage de parti de bandits massacreurs, comme ceux qui ont massacré des innocents à la ruelle Vaillant en 1987.


RÉSEAU CITADELLE (Le Ré.Cit), le 10 Novembre 2010, 14 heures 52.

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"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?
Haïti : La continuité du système colonial d'exploitation  prend la forme de monopole au 21e Siècle.
WITHOUT REFORM, NO RETURN ON INVESTMENT IN HAITI (U.S. Senate report.)

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