lundi 9 août 2010

Nous devons nous guerir de la reunionite par Gérard Bissainthe

Nous devons nous guérir de la réunionite
par Gérard Bissainthe


Les deux messages ci-dessous illustrent tristement une chose: la Diaspora qui est une immense force, est dans les faits d'une impuissance quasi totale. C'est un géant aux pieds d'argile. Et sa faiblesse a une seule cause: ELLE N'EST PAS ORGANISEE. L'objectif doit donc être de l'organiser. Mais alors la grande question est: quelle stratégie? 
La pire des stratégie est la suivante: les grandes réunions.

LES LECONS DE L'HISTOIRE
Un seul mouvement a jamais menacé sérieusement le régime de François Duvalier, c'est celui de Jeune Haïti. Il faut savoir pourquoi. En 1963 j'ai tenu ce discours aux jeunes qui étaient venu me chercher pour que je prenne la tête de leur organisation à laquelle j'avais tout de suite donné le nouveau nom de JEUNE HAITI:
"Nous sommes invités à des tas de réunions à droite et à gauche. Comme vous avez beaucoup insisté, j'ai assisté à quelques unes de ces réunions qui n'ont jamais abouti a quoi que ce soit, car dans toutes ces réunions on ne brasse que du vent. Voici ce que nous devons faire: construisons nous-mêmes un  train sans nous occuper de ce que font les autres. Mettons-le sur des rails. Une fois que ce train partira tout le monde va vouloir monter dedans."

C'est ce qui arriva, en effet. Jeune Haïti construisit un train sans s'occuper des autres. Le New York Times déclara dans un article que Jeune Haïti était le mouvement le mieux organisé de toute la résistance haïtienne. En fait il était le seul qui était vraiment organisé. Un jour ce train partit. Dès que les Treize débarquèrent à Dame-Marie, quasiment tout le monde se mit en branle pour tenter de les rejoindre. La démonstration avait été faite que "le mouvement se prouve en marchant". Pour le succès final il fallait une seconde condition qui ne fut pas réalisée et dont je parle ailleurs.

Revenons à nos moutons d'aujourd'hui. Si la Diaspora veut gagner la bataille, elle doit s'organiser et cela je l'ai dit dans un long memo que j'avais publié depuis 1989 et que je republierai bientôt. Mais pour l'organiser il ne faut pas perdre son temps en réunions, il faut agir. La réunionite est une maladie qui est toujours fatale.

Depuis quelque temps j'ai préconisé ceci: que la Diaspora laisse tomber les parlottes et se lance systématiquement dans une seule opération, pas deux: donner jarrettes à chacune de nos 580 sections communales et c'est ce que j'ai appelé le "municipalisme". Le Municipalisme n'est pas mon mouvement. Il part d'une constatation banale: toutes les nations prospères ont des microstructures fortes: c'est le cas des Etats-Unis, de la France, du Canada, et surtout de la Suisse, par exemple. Chez nous tout se passe dans la République de Port-au-Prince dont nous attendons toujours le salut. Il suffit qu'un chanteur populaire débarque à Port-au-Prince et soit acclamé dans un bidonville pour que nous entrions tous en transes. Tout le monde attend le Sauveur. Il a un nom: non pas le Christ, mais le Président. Pour sortir de cette frénésie il faut oublier tout le reste et établir une sorte de "PONT AERIEN" DIRECT SANS PASSER PAR LE GOUVERNEMENT entre chaque organisation et même chaque individu de la Diaspora avec chacune de nos 580 sections communales. Il n'est pas question d'être contre le Gouvernement mais d'agir PARALLELEMENT au Gouvernement. 

Dans les circonstances actuelles tous ceux qui écrivent vingt mille articles contre Préval et contre tous ceux qui tournent autour du Palais National, perdent royalement leur temps et leur argent ou plutôt celui de leurs commanditaires. Pour le moment la vraie victoire ne va pas se gagner au centre qui est verrouillé, cadenacé, mais à la périphérie dans les communes et dans les sections communales.

Rien ne va changer substantiellement ou significativement avec le prochain Président qui ne pourra pas faire beaucoup plus que l'actuel dans ce système qui, je n'arrête pas de le répéter, est verrouillé, cadenacé.  D'ailleurs les "Tuteurs" de ce système qui croient bien faire et croient consolider leurs propres intérêts se mettent eux-mêmes le doigt dans l'œil jusqu'au coude et se tirent tous les matins une rafale de mitraillette dans le pied.

Donc trêve de réunions.  Un seul objectif: DONNER JARETTES ET LE PLUS VITE POSSIBLE A CHACUNE DE NOS 580 SECTIONS COMMUNALES. Si nous le faisons tout de suite –et cela peut se faire de mille manières en utilisant notre imagination– dans six mois le pays change sans tirer un seul coup de fusil. Et Port-au-Prince (ou ce qui nous servira de Capitale) ne sera plus cette grosse tête omniprésente, plus nuisible qu'utile qu'il est aujourd'hui, mais une sorte d'ordinateur central qui régule sans les commander les activités nationales, comme une sorte de tour de contrôle dans un aéroport.  

Maintenant n'allez pas passer votre temps à tirer sur moi. Je ne suis  pas candidat à la Présidence, mais seulement à être un citoyen utile à son pays.

Réservez vos énergies pour la construction du pays et mettez-vous au travail. Si vous avez le courage de le faire, les jours de la Minustah sont comptés et se réalisera enfin la chanson de ma petite sœur Toto Bissainthe:
Leu la libéré
Haïti va bel O !

Gérard Bissainthe
7 août 2010
gerarbis1234@gmail.com

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