mercredi 23 juin 2010

Dialogue avec Serge Fourcand

The Great Audubon Stamp Scandal

By Jean Sénat Fleury
www.jeansenatfleury.com

John James Audubon was born in Haiti, on April 26, 1785, so it seemed quite fitting for the Haiti Postal Service in 1974 to issue a commemorative stamp honoring Audubon. Nobody anticipated the massive counterfeiting ring that developed and was selling fake Audubon stamps worldwide.

The 1975 Audubon stamp scandal illustrates beautifully to just what lengths Haiti's leaders would go in their frenzied quest for easy money. The scandal was an almost perfect crime, and only the most unexpected of coincidences uncovered and revealed it.

The architects of the stamp scandal were Jean-Claude Duvalier's sister Nicole, his ambassador to Spain, General Claude Raymond,  formerly his chief of staff, Internal Revenue Chief Franck Sterling, Port-au-Prince Airport Security Chief Gabriel Brunet, and Haitian Consul in Miami Eugène Maximilien. Jean-Claude himself was excluded from the scandal, and in fact his sister Nicole warned the others that they were dead men should any of them ever reveal her role in the affair.

The sheme was simple. Fake Haitian stamps, exquisite renderings of bird watercolors by native son Jean-Jacques Audubon, were printed in Russia and placed on world philatelist markets. But philatelist societies require authentication of all stamps issues that they promote. The schemers resolved this obstacle by bribing the state Press director to print a single issue of the official government Moniteur announcing the Audubon stamps and validated it with the forged signature of the appropriate Haitian Commerce Ministry official. The Philatelist Society in Switzerland was satisfied with the apparently genuine Moniteur, endorsed the Audubon stamp issue, and began to advertise it to stamp collectors the world over.
The schemers next bribed Haitian postal officials to authenticate the stamps with a first-day-of-issue postmark. Then they delivered them to a Miami Springs bank, entrepreneur for selling them, and began to rake in small fortunes. But an avid Haitian stamp collector who was the Commerce Ministry lawyer responsible for approving all stamps issues received an advertisement for the Audubon stamps. Perplexed and suspicious, he notified the Philatelist Society, which forwarded him a copy of the fake Moniteur. The official whose name had been forged denied any knowledge of the Moniteur and the stamps, and soon a national and an international scandal erupted. The international Postal Union is so upset with Haiti that is threatening to throw it out of the Union Postal.

Jean-Claude Duvalier's advisers convinced him that a public trial was essential to cool scorching international disapproval, and so in Haiti's first live television trial, a phalanx of Duvalier's officials confessed their guilt, accused their fellows, and were sentenced to jail. The international collectors were satisfied, for justice was done, and the publicity resulting from the trial gave the stamps additional value. The principal players in the scheme all escaped unscathed, and Nicole Duvalier's name was never mentioned. Some officials found guilty were innocent, but Jean-Claude rewarded them handsomely for their compliance in agreeing to be scapegoats. They were released early from comfortable jail cells and given money, jobs, and cars. (See Elizabeth Abbott's book, Haiti: The Duvalier and their Legacy, pp.189-190 of the 1988 hard-back edition).

Thirty five years later, I met Dr. Serge Fourcand at Montreal to discuss with him the stamp scandal so mysterious and suspicious, particularly the famous trial that started on August 26, 1975 to end on September 10, 1975. Here is on www.jeansenatfleury.com the French version of this interview.

JSF- Dr. Serge Fourcand, d'après plusieurs hommes de loi, le procès des timbres est considéré comme la plus remarquable audience tenue devant une cour de justice en Haïti. Qu'est-ce que vous en pensez?

SF- Je ne partage nullement cette opinion car le procès de la Consolidation fut autrement important que la pitoyable affaire des timbres Audubon, vulgaire manœuvre politique pour protéger le pouvoir et parer à une menace imaginaire.  En effet, le procès de la Consolidation mettait en cause tout un éventail de personnage politique de premier ordre ayant joué dans le passé et appelé à jouer ultérieurement des rôles importants dans la vie de la nation.

La petite crapulerie de Nicole Duvalier et de ses acolytes portait sur quelques dizaines de milliers de dollars, alors que le procès de la consolidation mettait en cause des personnages de premier plan accusé de malversations portant, selon l'acte d'accusation du 27 octobre 1904 sur une somme de 3 428 500 dollars.  Pour apprécier l'importance relative de cette somme, il faut savoir qu'elle dépassait les deux tiers des recettes budgétaires annuelles du pays, estimées alors entre 4 et 5 millions de dollars américains.  Les commanditaires et bénéficiaires de cette fraude à tous égards historique furent le président Tirésias Simon Sam, ses ministres et conseillers ainsi que les dirigeants allemands et français de la Banque nationale d'Haïti. Le Cabinet ministériel impliqué et  condamné au terme du procès était composé de Brutus St-Victor (ministre des Relations extérieures et des Cultes), Pourcely Faine (ministre des Finances et du Commerce), Vilbrun Guillaume Sam (ministre de la Guerre et de la Marine), Tancrède Auguste (ministre de l'Intérieur et de la Police), Cincinnatus Leconte (ministre des Travaux publics et de l'Agriculture) et Luxembourg Cauvin (ministre de l'Instruction publique et de la Justice).  Enfin, pour marquer le caractère exceptionnel et unique de ce procès dans nos annales juridiques et politiques, il suffira de rappeler que trois des condamnés allaient, avant longtemps, accéder à tour de rôle, à la première magistrature de l'État: Leconte, Auguste et V.G. Sam.

Contrairement au procès de la Consolidation, l'enquête dans l'affaire des timbres s'achevait sur une instruction bâclée.  Toute la procédure, téléguidée depuis le palais national et le ministère de la Justice visait un double objectif: occulter le rôle pourtant décisif de Nicole Duvalier qui avait dirigé,  financé et protégé les faussaires et, d'autre part, compromettre à tout prix et au mépris de la vérité et de toute vraisemblance celui qui était considéré par Mme Duvalier comme un dangereux candidat à la présidence.  A ce sujet, je ne peux résister à l'envie de citer celui qui fut un grand ministre et un analyste impitoyable des turpides nationales.  Le juriste Joseph Justin, auteur d'un grand classique de notre droit public <<Les Institutions haïtiennes>>, écrivait dans un autre essai: ¨Par leurs perfidies, par les accusations plates et viles, par leurs petitesses, ils arrivent à faire exécrer l'honnête homme, l'homme de mérite.  Ils arrivent à décréter la mort de ceux qui prétendent que l'immoralité, la corruption désorganisent et tuent un peuple. Ces gens insultent la misère publique.  Ils bâtissent des fortunes scandaleuses¨ (¨Les relations extérieures d'Haïti: Études historiques et diplomatiques, p.234, éd. Albert Savane, Paris, 1895)

Pour mesurer le caractère pitoyable du procès des timbres, il suffit de prendre l'exacte mesure de celui qui, nolens, volens, en fut le principal acteur.  Rock Raymond avait eu, avant de mourir, le temps et le courage d'exprimer ses regrets et sa honte.  En annexe à mon livre témoignage intitulé <Entre le vice et la vertu> (CIDHICA, Montréal, 2002) j'avais reproduit le fac-similé de notes manuscrites de mon défunt père, Me Noé C. Fourcand fils, dont la teneur et la valeur de témoignage directe et authentique n'ont jamais été ni discutées ni mises en doute.  Voici ce que consignait, pour l'histoire, la vraie, Me Noé C. Fourcand fils:

<<Huit jours après son jugement farci de considérations mensongères et désobligeantes pour ma famille, le juge Raymond me demanda un rendez-vous.  Cette démarche m'apparut inopportune.  J'y répondis négativement.  Une semaine plus tard, j'accompagnai ma sœur Jeanne au Canapé-vert vers huit heures du matin pour une petite intervention chirurgicale.  C'était ma première sortie depuis le procès des timbres.  Plusieurs médecins amis s'empressaient de venir me saluer avec effusion quand surgit devant nous le juge Rock Raymond, à la surprise générale.  Je lui tourne le dos.  Il s'approche de moi, les bras tendus, me supplie de l'écouter,  je recule, il se jette à genoux à mes pieds <Me Fourcand, vous me méprisez, vous me haïssez, je confesse publiquement que j'en suis très malheureux.  J'ai été faible, je n'ai pas pu résister aux pressions faites sur moi dans ce procès.  Aussi, j'ai perdu le sommeil, je ne vis
pas, pardonnez-moi, dites-moi que vous me pardonnez au nom de votre famille pour que je puisse retrouver la paix. >>

Voilà ce qu'il faut savoir pour prendre l'exacte mesure de la farce ignoble que fut le procès des timbres, pitoyable machination des Duvalier et de leurs sicaires.  Maintenant que la terre a été purgée de ces ombres maléfiques, je me contenterai de répéter le mot célèbre d'un homme d'État français <On ne tire pas sur une ambulance>; et moi j'ajouterai : << Ni sur un corbillard>>.

JSF- Partant de l'enquête, il n'y a aucun doute sur le fait qu'Eugène Maximilien et Frantz Leroy aient été les principaux auteurs matériels dans l'histoire des faux timbres Audubon. Pourtant, l'investigation n'a jamais mentionné les auteurs intellectuels. Qui, d'après vous, étaient les auteurs intellectuels de  cette affaire? 

SF- L'investigation n'a jamais mentionné les auteurs intellectuels, et pour cause.... Les magistrats étaient aux ordres et obéissaient servilement aux instructions du Palais. A  ce titre, ils devaient s'acquitter d'une double  mission: protéger à tout prix Nicole Duvalier et, dans le même temps, faire tout ce qu'il fallait pour que Serge Fourcand, dont la compétence et la probité sourcilleuse étaient reconnues internationalement, ne puisse jamais briguer la présidence de la République. Cette double mission constituait en fait un  vain pari  car, dans le premier cas, on visait l'impossible et dans le second, on enfonçait une porte ouverte.  La presse internationale et l'opinion nationale, dans le pays et dans la diaspora, n'ignoraient nullement le rôle décisif de Nicole Duvalier dans les émissions frauduleuses des timbres-poste, ni la  corruption qui régnait dans les cercles du pouvoir central.  Pour avoir une idée précise de l'ambiance délétère dans laquelle elle avait grandi, il suffit de lire l'essai percutant de Jean Florival "La face cachée de papa doc".  D'autre part, en ce qui me concerne, je redis que je n'ai jamais eu d'ambition  présidentielle, tout en me réservant de revenir plus longuement sur ce thème..

Pour braquer un éclairage impitoyable sur les ressorts cachés du procès, je citerai deux sources tout à fait étrangères au cannibalisme politique haïtien: le Lynn's Stamp News (la bible des philatélistes américains) et le plus important journal financier du monde: The Wall Street Journal.

Alors que Haïti Observateur (21, 29 mars 1975) titrait en première page : " NICOLE DUVALIER IMPLIQUEE DANS LE SCANDALE DES TIMBRES, le Lynn's Stamp News refaisait l'historique de cette affaire le 9 février 1981 en écrivant: "Il est bien connu qu'au moins deux ambassadeurs haïtiens ont été impliqués dans l'émission des timbres commémoratifs Audubon et quatre autres émissions de timbres. Mais ils n'ont jamais été arrêtés, inculpés ou appelés à témoigner par le parquet en Haïti," (traduction)

JSF - Il a été toujours mentionné sans réelle confirmation que certains noms étaient impliqués dans l'émission de faux timbres en Haïti. D'après vous, est-il réel que d'autres émissions frauduleuses de timbres aient été réalisées sous le gouvernement de Jean-Claude Duvalier ?

SF - Les gouvernements de François Duvalier (scandale de l'émission des timbres Wilson Churchill) et de Jean-Claude Duvalier (commémoration de nombreuses manifestations sportives ou autres d'envergure internationale) ont été propices à la fraude et à la corruption.  Pour bien identifier les mains cachées qui tiraient les ficelles, il faut lire Elizabeth Abbott "Haïti - An insider history of the rise and fall of the Duvalier"(1988, pp. 190-191).  A propos des émissions frauduleuses de timbres pour lesquelles vous demandez des précisions, elle accuse formellement "Nicole Duvalier et Claude Raymond, alors ambassadeur en Espagne, ex-chef d'Etat major, ainsi que Franck Sterling, ex-directeur du Bureau des contributions, Gabriel Brunet, chef de la sécurité à l'aéroport international et Eugène Maximilien, Consul haïtien à Miami."

Comme l'écrit Leslie Péan (tome 4, p. 484) : "...Quand Eugène Maximilien fut accusé dans une affaire de timbres, les autorités américaines ne se montrèrent pas trop concernées et restèrent indifférentes.  Il s'agissait de protéger Nicole Duvalier afin de ne pas éclabousser la famille Duvalier. "  Warren Weiner arrive à la même conclusion à la page 60 du numéro cité du Lynn's Stamp News.  On comprend donc aisément la grâce accordée par le frère de Nicole Duvalier à Eugène Maximilien et à certains de ses complices. 

JSF - L'une des raisons toujours avancées pour expliquer les persécutions dont vous étiez l'objet notamment avec l'affaire des timbres Audubon, est que vous aviez l'intention de vous portez candidat à la présidence pour remplacer Jean-Claude Duvalier ?

SF - A la fin de janvier 1975, au terme d'une cérémonie de remise de lettres de créance au salon jaune du palais national, le président me dit en aparté : "Siclait et Antonio André me disent et me redisent que vous êtes le candidat de la bourgeoisie haïtienne pour la présidence d'Haïti".  Je répondis calmement : "Ils doivent bien me haïr pour me donner pareille ambition et en telle compagnie".  Il s'efforça de me rassurer me disant "Je ne crois pas à ce qu'ils disent.  Si je le croyais, je ne vous en aurais jamais parlé".  Il a ajouté alors :"Dans ma famille même on a décidé de vous faire assassiner et à partir de ce jour j'attache deux militaires à votre sécurité."

Je veux prévenir toute ambiguïté à ce sujet.  Citoyen haïtien, jouissant de tous mes droits civils et politiques j'étais parfaitement habilité à désirer et à rechercher toute fonction répondant à mes compétences dans le cadre des institutions administratives et politiques haïtiennes  Je suis issu d'une longue et très digne lignée d'hommes intègres qui ont servi la patrie à des postes éminents.  Mes grands-parents du côté maternel (Joseph Vilaire et son épouse Clara Clérié) descendaient tous deux d'Alain Clérié qui présida la prestigieuse assemblée constituante qui donna naissance à la constitution de 1888, sous l'égide de laquelle gouverna F. D. Légitime.  Mon grand-père paternel, Noé C. Fourcand, fut député de Jérémie de 1932 à 1936.  Mon grand oncle, Etzer Vilaire, ancien député de Jérémie (1930-1932), fut vice-président de la Cour de Cassation.  Enfin, mon père, Me Noé C. Fourcand fils, fut ministre des Finances de 1948 à 1950 sous le gouvernement de Dumarsais Estimé après avoir été durant de longues années l'avocat-conseil de cette institution et son directeur général adjoint.  Issu d'une telle famille, j'aurais pu me croire bien placé pour briguer toute fonction élective dans mon pays.  Mais, je n'ai jamais été intéressé ou attiré par le pouvoir politique.  Je me suis toujours considéré comme étant essentiellement un juriste et un économiste apte à travailler tant dans le secteur public que dans le secteur privé.  Telle fut d'ailleurs ma trajectoire professionnelle.

JSF - Vous avez été secrétaire d'Etat au Commerce de 1971 à 1975 sous Jean-Claude Duvalier.  Comment pouvez-vous juger votre action au sein de ce Ministère?

SF - Je ne veux pas me lancer dans ce que certains, ignorants ou malveillants, (on est souvent les deux à la fois en Haïti), seraient tentés d'appeler un plaidoyer pro-domo.  Il vaut mieux laisser parler les autres qui étaient bien placés pour suivre mon action et qui n'avaient aucune raison de me ménager.  Le "Wall Street Journal" du 23 mars 1975 écrivait: "Serge Fourcand used to teach Economics to Jean-Claude Duvalier ... He was a shining light of Baby Doc's government, a forward looking technocrat who expanded Haiti's contacts with the outside world and tried to dispel the aura of corruption and incompetence that enveloped the brutal regime of Jean-Claude father's, François Duvalier.

Le président de la Commission spéciale du gouvernement américain pour le commerce des textiles, l'ambassadeur A. J. Jurich m'écrivait le 30 septembre 1974: "Seldom, if ever have I met with as eloquent and faithful representative of another country.  You have every reason to take pride for the role you played as advocate for Haiti's national interests.  You may be certain that I shall recall with the highest respect and admiration the role you played last week as the representative of your President, your country et your people."  Le fac-similé de cette lettre est reproduit à la page 219 de mon livre témoignage paru en 2002 à Montréal; on y trouvera également la lettre du 21 août 1974 par laquelle Bernard Dorin, ambassadeur de France exprimait "son admiration pour l'ampleur de mes réalisations à la tête de mon ministère, et celle du 6 mai 1974, également élogieuse du Sénateur républicain Edward Brooke, à l'époque seul sénateur afro-américain à Washington.

Le périodique de la diaspora haïtienne DEMOCRATIE NOUVELLE, à la page 2 de son numéro de juillet - août 1978 rappelait comme suit mon passage aux affaires de l'Etat: "On se souvient que Serge Fourcand à la suite de sa croisade contre la toute puissante Reynolds avait été humilié.  Fourcand avait pourtant réussi à faire gagner 7 millions de dollars au gouvernement et obtenu l'adhésion haïtienne à la CARICOM et à l'Association internationale de la bauxite.  Il avait cru pouvoir s'élever au dessus de la mafia duvaliériste et lui faire la morale.  Il la mettait en garde contre le détournement des fonds versés par la Reynolds et en préconisait l'investissement dans les routes."

Enfin, je vais citer un bref passage de l'œuvre monumentale en quatre forts volumes de Leslie J. R. Péan "Haïti, Economie politique de la corruption, tome IV (Maisonneuve et Larose, Paris 2007) "Fourcand avait le désir de bien faire, d'être différent, de se surpasser.  Le reproche que le système viscéralement corrompu adresse à Fourcand est qu'il n'est pas l'un d'eux et  qu'il détonne dans le paysage.  La corruption du système demande des individus qui sont des ombres.  Une machination fut organisée contre lui ... Dans cette affaire, la solidarité des corrupteurs et des corrompus s'étale avec une grande visibilité.  Le coup monté contre Serge Fourcand est le résultat de sa bonne gestion et du fait qu'il a mis en marche entre 1971 et 1975 un train de mesures qui l'ont mis nez à nez avec la mafia au pouvoir... La ficelle des accusations fantaisistes contre lui est grosse..."

Ces différents éclairages dissipent toutes les ombres et révèlent crûment  la  nature du régime dont la corruption était incompatible avec la rigueur et la probité qui ont caractérisé toute mes démarches.

JSF - Quelle est votre opinion sur les acteurs du procès ?

SF -  Dans mon livre publié en 2002 j'ai dit leur fait aux magistrats aux ordres dont la forfaiture collective fut récompensée notamment par la remise gracieuse de voitures de marque Volvo; ce qui inspira au peuple malicieux, et qui n'était pas dupe de la supercherie, cette remarque piquante: "Le vol vaut".

Le triste sort que le destin réserva à Aurélien Jeanty et Henri Siclait et à tant d'autres me dispensent de m'appesantir sur mes bourreaux et mes tourmenteurs qui, outre plus de cent cinquante jours au Pénitencier national, m'avaient imposé pendant plus d'un mois l'enfermement au secret dans une cellule nue des Casernes Dessalines, me soumettant au régime dégradant de la privation quasi complète de sommeil; leurs sbires - les SD - entraient dans ma cellule chaque nuit vers une heure du matin pour me conduire dans la salle des interrogatoires.  Là, j'étais soumis sans répit à des menaces de toutes sortes, à des questions pièges véhiculant des mensonges absurdes et des inventions tordues propres à me plonger dans la confusion la plus totale.  J'étais donc soumis à un régime pénitentiaire d'extrême rigueur et à une certaine forme particulièrement insidieuse de la "Question", typique des méthodes totalitaires destructrices de la personnalité, comme on peut les voir en action dans certains films de Costa-Gavras, notamment l'Aveu.

Après un jugement de non-lieu assorti de considérations dont le juge Rock Raymond lui-même avouait le caractère malveillant et injuste, je quittai la patrie que j'avais tant aimée et pour laquelle j'avais tant souffert. 

JSF-Dr. Serge Fourcand au nom de l'équipe du blog www.jeansenatfleury.com  je vous remercie.   

SF- C'est moi qui vous remercie.

N.B. Ancien Secrétaire d'État  au Commerce et à l'Industrie de 1971à  1975 sous Jean-Claude Duvalier, et partit en exil au Canada, le Dr. Serge Fourcand, cadre honnête, compétent  et respecté, ancien professeur de droit international et d'économie à l'Université d'État d'Haïti, a mené une carrière fructueuse dans le secteur privé, à Ottawa.  Malgré, ses préoccupations professionnelles, il a trouvé le temps de préparer et d'obtenir un diplôme d'Études Supérieures en droit international public à l'Université d'Ottawa. En 1983, de retour en Haïti, tout en reprenant son enseignement à l'Université d'État d'Haïti, notamment à l'INAGHEI, il a entamé une carrière dans le secteur privé, en tant que directeur de la Banque de Crédit immobilier, et ensuite de conseiller juridique de quatre banques, de grands bureaux d'assureurs, de l'Office de gestion de l'aide alimentaire au titre du PL-480 et de plusieurs entreprises commerciales et industrielles. En 1998, il a prit sa retraite à Montréal tout en poursuivant ses recherches dans le domaine juridique, notamment au sein de la World Jurist Association dont il est l'un des présidents nationaux.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

UN DIALOGUE VRAIMENT INSTRUCTIF. MERCI JSF-POST.