lundi 3 mars 2008

UN POT DE CHAMBRE


Jean Erich René
3 mars 08


Dans nos villes grandissantes l'approvisionnement en nourriture devient un casse-tête pour les familles. Tous les Chefs lieux de nos Départements dépassent de nos jours 100.000 habitants. La production agro-alimentaire déjà modeste ne peut plus suivre la courbe de croissance démographique. Nous ne pouvons pas nous payer non plus le luxe d'importer continuellement des denrées alimentaires comme le riz par exemple. Nos échanges commerciaux ne dégagent pas suffisamment de devises pour couvrir les frais correspondants. Pourtant dans certaines régions encore florissantes d'Haïti il y a un gaspillage de fruits et de légumes. Haïti est le paradoxe de la famine en pleine abondance.

Grâce à la largesse de la nature notre habitude alimentaire varie selon les saisons. Nous vivions aisément, à l'année longue, de la cueillette de nos fruits sans nous soucier du lendemain. Nous nous gavions à satiété de mangues, d'oranges, de véritables, d'arbres à pain, de corossols, de cocoyers etc. sans augmenter nos vergers en prévision du taux de croissance de la population. Aujourd'hui l'équilibre est rompu! Pourtant il
peut être aisément rétabli de manière intelligente. Le Roi Henry Christophe associait l'indépendance d'Haïti à la capacité de ses dirigeants de nourrir le peuple. Aujourd'hui encore le souvenir du Roi du Nord demeure
impérissable non seulement pour la Citadelle bâtie pour défendre son royaume mais surtout pour les grandes plantations d'arbre fruitier qu'il avait ordonnées à son Ministre de l'Agriculture, le Baron de Vastey, de dresser en vue de parer à toute disette. C'est pourquoi le Nord demeure le bastion des mangues, des oranges et des noix d'acajou etc.

Il est urgent que le Gouvernement haïtien prenne les mesures nécessaires pour combattre la famine qui sévit actuellement en Haïti. Il ne suffit pas d'exécuter les acrobaties les plus périlleuses et les plus coûteuses pour obtenir un vote de confiance du Parlement. S'il est possible d'acheter la conscience de nos députés pour la bagatelle de 60.000 dollars US par tête, la colère populaire n'a aucun prix. L'histoire politique haïtienne est riche en séquences événementielles depuis 1804de ce peuple bafoué en colère saccageant tout sur son passage. Le climat social haïtien actuellement est propice à un soulèvement populaire afin de sanctionner le comportement irresponsable des membres de la 48eme législature qui ont accordé un vote
de confiance à Jacques Edouard Alexis. Il s'agit d'un acte de trahison que tôt ou tard les mandataires du peuple vont payer.

Quel est le sens de ce vote de confiance ? Comme Judas qui s'est pendu après avoir accepté ces 30 deniers, nos députés regretteront amèrement d'avoir porté ce coup fatal à la nation haïtienne. Aveuglés par l'appât du gain, d'un coté ils ne se sont pas rendus compte qu'ils ont cautionné publiquement la politique de nullité de Jacques Edouard Alexis qui a déclaré récemment qu'il ne peut pas faire sortir du sang des rochers pour
soulager la misère des masses nécessiteuses. De l'autre coté, en politique le fait de sauter un obstacle dressé sur son passage donne un regain de confiance a l'adversaire tout en décuplant sa force. Le triomphe de
Jacques Edouard Alexis le Jeudi 28 février, peu importe les moyens employés, prouve qu'il maîtrise la machine et ne manquera pas de briguer la présidence avec les mêmes leviers qui ont fait leurs preuves. Sa proximité par rapport aux Collectivités Territoriales qu'il soudoie en profitant de son poste de Premier Ministre lui accorde l'envergure et la surface nécessaires pour un vote populaire. Suivez cet animal a sang froid que le Club de Bourdon a logé à la Villa d'Accueil. Il possède le ballon et file droit vers le Palais National. Abundat divitiis nulare caret : il abonde en richesse et ne manque de rien.

En Haïti la politique du béton a toujours triomphé et Jacques Edouard Alexis n'est pas à son coup d'essai. Tandis que 8.400.000 habitants croupissent dans la crasse et la misère, nos députés appelés au vote ont
adopté la politique du Gouvernement Préval/Alexis qui a mis le pays au bord de la famine et de la faillite. Ce vote de la honte a subitement sollicité l'attention de nos voisins dominicains qui ont jugé le moment
opportun pour proposer, par euphémisme, la fédération de Santo Domingo Dominicanie et d'Haïti pour en faire l'Ile Quisqueya. Que dirait Jean Pierre Boyer qui a occupé l'autre moitié de l'île ? Le Docteur François
Duvalier qui avait rendu la monnaie de sa pièce à Juan Bosch en le renversant après avoir massé sa troupe sur la frontière est en train de se retourner dans sa tombe. Son sang n'aura fait qu'un tour en écoutant ces
impertinentes déclarations de l'ambassadeur dominicain en Haïti qui, au lever du jour par un arrêté d'expulsion, traversera la frontière en vitesse.

Autre temps, autre Chef. Haïti est devenu cette brebis galeuse que personne ne respecte par suite du comportement débonnaire de l'Exécutif haïtien qui déclare urbi et orbi qu'il est incompétent. Le salut ne viendra pas non plus de l'autre branche du pouvoir qui, à quelques rares exceptions, est pourrie. Quand aux Partis politiques, vaut mieux fermer la parenthèse car leurs leaders de la droite vers la gauche sont achetés argent comptant. Dans un pays complètement à la dérive on comprend la velléité de la République Dominicaine de prendre sa revanche sur l'histoire en nous retournant la gifle de 1825. Le Président Lionel Fernandez au dire de son ambassadeur en Haïti a toujours fait preuve d'une sollicitude agissante envers le peuple haïtien au profit duquel il réclame l'aide étrangère. Il aurait du d'abord le prouver aux Haïtiens des bateys. Il n'y a pas longtemps qu'il forçait les sans-papiers à déguerpir !

La 48 ème législature a raté l'occasion de porter le gouvernement Préval/Alexis à se ressaisir. Les médiocres résultats obtenus au cours des 2 premières années n'augurent aucun espoir pour l'avenir. La flagrance des déclarations du Président René Préval , du PM Jacques Edouard Alexis et du Ministre de l'Agriculture suffit pour nous convaincre. Un vote de confiance n'est autre qu'un satisfecit que la chambre des députés qui les a convoqués leur accorde pour un travail bien accompli. Tandis que le peuple crève de
faim des denrées alimentaires abondent durant la saison des récoltes dans nos communautés rurales. Mais elles sont périssables. Rien n'a été entrepris par l'Etat haïtien pour les conserver afin de prévenir la famine.

Dans tous les pays du monde l'ensilage des céréales et la congélation des fruits et légumes permettent de parer aux mortes saisons. Chez nous tous les produits qui ne sont pas consommés sur place pourrissent, faute de moyen de transport adéquat et par manque d'un système de conservation : silos, chambres froides. Actuellement en Haïti la taille de la population à nourrir n'est plus à la portée des Madan Sara ni des techniques artisanales de conservation telles que gouann, tache, kata, barrique, salaison etc. Notre ravitaillement exige un contrôle rigoureux de la gestion des stocks. L'inventaire périodique, selon les techniques modernes de la comptabilité informatisée, les codes à barre et les caisses enregistreuses permettent d'éviter les raretés provocatrices de la montée des prix. Avec un coussin de sécurité on peut parer aux impondérables. La technique du gerbage est mise à profit afin de réduire au cours du transport les pertes dues au développement d'un point chaud dans la masse et l'écrasement occasionné par l'effet de la pesanteur.

Une nouvelle étape doit être franchie dans la production agro-alimentaire haïtienne tributaire des caprices du marché soumis à des variations erratiques. A l'instar de Judas l'Iscariote qui a prolongé la souffrance de l'humanité en livrant Jésus à ses bourreaux pour 30 deniers, les transfuges de la 48 ème, en accordant un vote de confiance au PM Alexis pour sa forfaiture sans nom, viennent de pérenniser la misère du peuple haïtien pour la broutille de 60.000 dollars US. Honte à eux ! Ils ne sont plus dignes de leurs cocardes et ne représentent qu'eux-mêmes, pas leurs circonscriptions. Une fois de plus, la ville de Jérémie, la cité de Goman, est à l'honneur grâce à la vaillance et à l'intrépidité de son député. Bonne note est prise! En permettant à Alexis de satisfaire ses sales besoins au Palais Législatif, la CHAMBRE BASSE s'assimile à UN POT DE CHAMBRE

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